Les Assises du Journalisme, qui se sont déroulées le 1er et 2 octobre à Tours, avaient pour thématique « Informer aux temps du Covid ». L’occasion pour les médias et journalistes invités de revenir sur cette période pleine de défis, qui les a poussé à se réinventer.
« On a réussi cet exploit de se renouveler. C’était un travail inédit et je pense que cette crise a décuplé nos capacités en redonnant un sens à notre métier » affirme Anne-Claire Coudray, présentatrice du JT du week-end de TF1. Un sentiment commun à tous les médias – journalistes, qui se sont succédé sur la scène de l’Espace Mame, s’exprimant tour à tour sur la gestion médiatique du Covid, ce « breaking new mondial »1. Le virus a en effet amené avec lui des questionnements qui n’avaient jusqu’alors jamais été posés au sein des rédactions : comment appréhender une uni-actualité aussi accaparante ? Comment produire du contenu dans un contexte d’urgence permanente et de télétravail ? Enfin, comment garder un lien avec les spectateurs – lecteurs, alors même que le pays semble pétrifié ?
« On reçoit les nouvelles AFP, on pense au SRAS. Mais le premier vrai déclencheur d’inquiétude pour nous, ça a été l’Italie » raconte Mélanie Maingot, directrice de la rédaction de M6 2, « on se demande comment va t-on gérer cette crise ? » Très vite les médias s’organisent et bousculent leur programmation. Télétravail, délocalisation, augmentation des durées des JT… Une réactivité saluée par Roch-Olivier Maistre, président du CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel) dans sa « Carte Blanche3 » : « J’ai été épaté de la façon dont les médias se sont adaptés. »
ont répondu aux questions de Christophe Guyomard
La crise du Covid s’impose partout, y compris sur les écrans. L’INA (Institut National de l’Audiovisuel), représenté aux Assises, par Géraldine Poels1, historienne et responsable de la valorisation scientifique des archives INA, a réalisé une étude durant ces 6 derniers mois sur le traitement du Covid – 19 au sein des cinq grandes chaînes généralistes que sont TF1, France 2, France 3, Arte et M6. Les résultats ci-dessous témoignent « d’une couverture inédite pour une pandémie », selon les mots de l’historienne.
« Il fallait être inventif tout le temps »
Difficile donc de faire un pas de côté vis-à-vis de cette actualité omniprésente. Pour autant, cette dernière a paradoxalement poussé les médias à se réinventer et à se questionner sur de nouveaux moyens pour traiter l’information. « Ce que j’ai trouvé fort c’est la créativité qu’a déclenché ce moment qui nous a d’abord sidéré » remarque Marie-Christine Saragosse, PDG de France Médias Monde4. Un constat partagé par la majorité des intervenants des Assises, notamment les journalistes de presse quotidienne régionale et de presse spécialisée qui ont du composer avec cette actualité nationale écrasante. La plupart d’entre eux ont développé leur présence numérique comme La Nouvelle-République 5, qui a développé un podcast intitulé Dans l’oeil du Coronavirus, ou encore Télérama qui a vu son site s’enrichir considérablement durant cette période. « On a essayé de maintenir un lien avec nos lecteur à travers le web, pour qu’ils ne souffrent pas de la baisse de la pagination papier. Il fallait être inventif tout le temps » explique Fabienne Pascaud, directrice de la rédaction du magazine6. L’Equipe, qui a subi toutes les annulations des compétitions sportives, a également redoublé d’inventivité : « On s’est beaucoup appuyé sur les archives. On a réalisé des « séries » comme celles sur Didier Deschamps ou les femmes journalistes de sport » détaille Jean-Philippe Leclaire, directeur adjoint du journal6. D’autres médias se sont tournés vers le journalisme dit de « solutions » afin de répondre au besoin d’information, unanimement constaté. Le dialogue entre lecteurs – spectateurs et média n’a jamais été aussi important. Les rubriques « On vous répond » (ex BFM vous répond1) et les courriers de lecteurs fleurissent un peu partout. « Cette crise a été un accélérateur assez fantastique. Elle nous a considérablement rapproché de notre public » souligne François-Xavier Lefranc, rédacteur en chef Ouest France.6 La pandémie de Covid-19 a également permis aux médias de réfléchir sur leur propre évolution. Beaucoup ont maintenu les différents dispositifs mis en place lors de ces derniers mois, et prennent appui sur ces derniers pour construire le journalisme de demain.
Les Assises Internationales du journalisme sont à retrouver sur Youtube
Conférences citées
1 LE FACE À FACE. UN BREAKING-NEWS MONDIAL DE 55 JOURS ! POUVAIT-ON FAIRE AUTREMENT ?
Avec Anne-Claire COUDRAY, présentatrice des éditions du weekend TF1 (en duplex de TF1) ; Frank MOULIN, directeur adjoint de la rédaction BFMTV.
2 ET SOUDAIN LE VIRUS APPARUT. RETOUR SUR LE TRAITEMENT DE LA PANDÉMIE DANS LES JT FRANCAIS. Avec l’INA et La Revue des Médias.
Avec Antoine GUÉLAUD, directeur des opérations spéciales du groupe TF1 ; Mélanie MAINGOT, directrice de la rédaction de M6 ; Géraldine POELS, historienne et responsable de valorisation scientifique des archives de l’Ina ; François QUINTON, rédacteur en chef de La Revue des Médias de l’INA.
3 CARTE BLANCHE À ROCH OLIVIER MAISTRE, PRÉSIDENT DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L’AUDIOVISUEL.
4 CARTE BLANCHE À MARIE-CHRISTINE SARAGOSSE, PDG DE FRANCE MÉDIAS MONDE (en direct de France Médias Monde).
5 LE COVID, ACCELERATEUR D’INNOVATIONS. L’EXEMPLE DE LA PRESSE QUOTIDIENNE RÉGIONALE. Avec Les entretiens de l’info.
Avec Damien ALLEMAND, chef de service digital Nice Matin ; Dorothée BRIMONT, JRI Paris-Normandie ; François-Xavier LEFRANC, rédacteur en chef Ouest France ; Chantal PETILLAT, rédactrice en chef La Nouvelle République. Animé par Jean-Marie CHARON, sociologue des médias et chercheur au CNRS.
6 LE FACE À FACE. NI SPORT NI CULTURE : INFORMER QUAND SON ACTUALITÉ DISPARAIT.
Avec Jean-Philippe LECLAIRE, Directeur adjoint de la rédaction de L’Equipe ; Fabienne PASCAUD, (en duplex de Télérama) Directrice de la rédaction de Télérama.
Madame regarde 